Dimanche 22 novembre

Dimanche 22 novembre 2020.

(9 novembre dans l’ancien calendrier).

(Pas de célébration ce dimanche à Saint-Nicolas.)

 

Péricopes de ce dimanche

Lecture de l’épître de saint Paul aux Éphésiens (2, 14-22) :

Frères, le Christ est notre paix, lui qui en un seul peuple a réuni les Juifs et les païens, et qui a renversé le mur de haine qui les séparait. Ayant anéanti par sa chair la loi des ordonnances dans ses prescriptions, afin de créer en lui-même avec les deux un seul homme nouveau, en établissant la paix, et de les réconcilier, l’un et l’autre en un seul corps, avec Dieu par la croix, en détruisant par elle l’inimitié. Il est venu annoncer la paix à vous qui étiez loin, et la paix à ceux qui étaient près ; car par lui nous avons les uns et les autres accès auprès du Père, dans un même Esprit. Ainsi donc, vous n’êtes plus des étrangers, ni des gens du dehors ; mais vous êtes concitoyens des saints, gens de la maison de Dieu. Vous avez été édifiés sur le fondement des apôtres et des prophètes, Jésus Christ lui-même étant la pierre angulaire. En lui tout l’édifice, bien coordonné, s’élève pour être un temple saint dans le Seigneur. En lui vous êtes aussi édifiés pour être une habitation de Dieu en Esprit.

Ибо Он есть мир наш, соделавший из обоих одно и разрушивший стоявшую посреди преграду, упразднив вражду Плотию Своею, а закон заповедей учением, дабы из двух создать в Себе Самом одного нового человека, устрояя мир, и в одном теле примирить обоих с Богом посредством креста, убив вражду на нем. И, придя, благовествовал мир вам, дальним и близким, потому что через Него и те и другие имеем доступ к Отцу, в одном Духе. Итак вы уже не чужие и не пришельцы, но сограждане святым и свои Богу, быв утверждены на основании Апостолов и пророков, имея Самого Иисуса Христа краеугольным камнем, на котором все здание, слагаясь стройно, возрастает в святый храм в Господе, на котором и вы устрояетесь в жилище Божие Духом.

Lecture de l’Évangile selon saint Luc (12, 16-21)

En ce temps-là, le Seigneur dit cette parabole. Il y avait un homme riche dont le domaine avait beaucoup rapporté. Et il se demandait en lui-même : « Que vais-je faire ? Car je n’ai pas de place pour mettre ma récolte. » Puis il se dit : « Voici ce que je vais faire : je vais abattre mes greniers, j’en construirai de plus grands, j’y serrerai tout mon blé et mes biens, et je dirai à mon âme : Mon âme, tu as quantité de biens en réserve pour beaucoup d’années ; repose-toi, mange, bois, réjouis-toi ! » Mais Dieu lui dit : « Insensé ! Cette nuit même on va te redemander ton âme ; et ce que tu auras amassé, qui l’aura ? » Ainsi en est-il de celui qui amasse pour lui-même, au lieu de s’enrichir en vue de Dieu

И сказал им притчу: у одного богатого человека был хороший урожай в поле; и он рассуждал сам с собою: что мне делать? некуда мне собрать плодов моих? И сказал: вот что сделаю: сломаю житницы мои и построю бо́льшие, и соберу туда весь хлеб мой и всё добро мое, и скажу душе моей: душа! много добра лежит у тебя на многие годы: покойся, ешь, пей, веселись. Но Бог сказал ему: безумный! в сию ночь душу твою возьмут у тебя; кому же достанется то, что ты заготовил? Так бывает с тем, кто собирает сокровища для себя, а не в Бога богатеет.

Paroles des Pères

Il est deux sortes d’épreuves. Nous sommes attaqués dans ce monde, ou par l’affliction qui, comme l’or dans le creuset, éprouve notre âme et fait connaître sa force en exerçant sa patience, ou par la prospérité même, qui est un autre genre d’épreuve. Car ce sont deux choses également difficiles pour l’âme, de ne pas se laisser abattre dans les peines de la vie, et de ne pas se laisser porter aux excès dans la prospérité. Job nous fournit un exemple de la première sorte d’épreuve […], le riche de l’évangile qu’on vient de lire, nous offre un exemple, entre mille autres, de l’épreuve dans les heureux succès. […]

Dieu a comblé de bienfaits le riche de l’Évangile. Et que voyons-nous dans ce riche ? des mains fermées à toute largesse, un cœur dur, insensible aux besoins et aux souffrances d’autrui. Voilà sa reconnaissance pour les dons multipliés de son bienfaiteur. [..]

Le mal dont souffre son âme me paraît semblable à celui qu’éprouvent les gloutons : ils aiment mieux crever de gloutonnerie que de partager leurs restes avec les pauvres. Écoute, ô homme, celui qui t’a pourvu. Souviens-toi de toi-même, qui tu es, quel bien tu administres, de qui tu l’as reçu, pourquoi tu as été préféré à la plupart. Tu as été fait serviteur d’un Dieu bon, intendant de tes compagnons d’esclavages ; ne crois pas que tout a été préparé pour ton ventre. Délibère au sujet des biens que tu as en mains avec la pensée que ce sont ceux d’autrui : ils te charment un peu de temps, puis ils s’écrouleront et disparaîtront, mais il t’en sera demandé un compte exact. […]

« Que ferai-je ? » Il était tout simple de dire : je rassasierai les âmes de ceux qui ont faim, j’ouvrirai mes greniers et j’inviterai tous les pauvres. […] Tu t’entretiens avec toi-même dans le secret, mais tes paroles sont examinées dans le ciel. Aussi, est-ce de là que t’arrivent les réponses. Quels propos tiens-tu ? « Mon âme, tu as en réserve beaucoup de biens ; mange, bois, réjouis-toi chaque jour » (Lc 12, 19). Ô folie ! Si tu avais une âme de porc, quel autre plaisir lui préparerais-tu ? Es-tu si courbé vers la terre, comprends-tu si peu les biens de l’âme, que tu offres à la tienne des nourritures grossières, et que tu destines à cette âme tout ce que les entrailles mêmes rejettent dans les latrines ? Si ton âme est décorée de vertus, si elle est pleine de bonnes œuvres, si elle habite près de Dieu, alors elle a beaucoup de biens et elle se réjouit de la joie légitime et pure de l’âme. Mais puisque tes pensées sont terrestres, que tu as pour dieu ton ventre, que tu es tout charnel, asservi à tes passions, écoute le nom qui te convient, celui qu’aucun homme ne t’a donné mais le Seigneur lui-même : « Insensé ! cette nuit même on te redemandera ton âme ; et ce que tu as mis en réserve, pour qui sera-t-il ? » (Lc 12, 20). […]

Celui qui, dans quelques instants, va être emporté et conduit devant le Juge, quels desseins forme-t-il ? « Je détruirai mes greniers et j’en construirai de plus grands ». […] Quoi de plus sot que de se fatiguer sans cesse, de s’empresser de construire pour s’empresser de détruire ? Tu as comme greniers, si tu le veux, le ventre des pauvres. « Amasse-toi un trésor dans le ciel » (cf. Mt 6, 20). Ce qui est déposé là, les vers ne le mangent pas, la pourriture ne le dévore pas, les voleurs ne le dérobent pas. — Mais je partagerai avec les pauvres, quand j’aurai rempli mes seconds greniers. — Tu as fixé toi-même à ta vie un terme très éloigné. Prends garde que le temps, pressé d’arriver au jour fixé par Dieu, ne te devance, car ta promesse est une preuve, non de ta bonté, mais de ta méchanceté. En effet, tu promets, non pour donner ensuite, mais pour te soustraire au devoir présent. Qu’est-ce qui t’empêche de donner maintenant ? Le pauvre n’est-il pas là ? Tes greniers ne sont-ils pas pleins ? La récompense n’est-elle pas prête ? Le précepte n’est-il pas clair ? Celui qui a faim se consume, celui qui est nu est gelé, celui à qui on réclame une dette s’étrangle, et toi, tu renvoies ton aumône à demain ? […]

Tu ne connais qu’un mot : « je n’ai rien, je ne donnerai rien car je suis pauvre. » Pauvre, tu l’es en effet, et dépourvu de tout bien : pauvre d’amour, pauvre de bonté, pauvre de foi en Dieu, pauvre d’espérance éternelle. Donne à tes frères une part de tes vers ; partage aujourd’hui avec l’indigent ce qui sera pourri demain. C’est faire preuve de la plus odieuse des avarices, que de ne pas vouloir partager avec les pauvres même ce qui se perd.

« À qui fais-je tort, dit l’avare, en gardant ce qui m’appartient ? » Qu’y a-t-il, dis-moi, qui t’appartienne ? Où as-tu pris quelque chose pour l’introduire dans ta vie ? C’est comme si quelqu’un, s’étant emparé d’une place dans les spectacles publics, voulait empêcher les autres d’entrer, parce qu’il considère comme sa propriété personnelle ce qui est mis à la disposition de tous indistinctement. Tels sont les riches. Des biens qui sont communs, ils les regardent comme leur étant propres, parce qu’ils s’en sont emparés les premiers.

Si chacun prenait seulement de quoi subvenir à ses besoins et laissait le superflu à l’indigent, personne ne serait riche, personne ne serait pauvre, personne ne serait dans la misère. N’es-tu pas sorti nu du sein de ta mère ? Ne t’en retourneras-tu pas nu encore dans la terre ?

Les biens présents, d’où te sont-ils venus ? Si tu crois les tenir du hasard, tu es un impie, car tu méconnais Celui qui t’a créé et tu n’as pas de reconnaissance pour Celui qui te les a donnés. Si tu admets que c’est de Dieu, dis-nous la raison pour laquelle tu les as reçus. Dieu serait-il injuste, lui qui nous distribue inégalement les choses nécessaires à la vie ? Pourquoi es-tu riche, toi, alors que celui-là est pauvre ? N’est-ce pas seulement pour que toi, tu reçoives la récompense de ta bonté et de ta fidèle administration, et que lui soit honoré des prix magnifiques réservés à la patience ? Mais toi, qui fais tout disparaître dans les insatiables replis de ton avarice, crois-tu ne faire de tort à personne, lorsque tu prives du nécessaire tant de misérables ?

Qui est l’avare ? Celui qui ne se contente pas du nécessaire. Qui est le spoliateur ? Celui qui s’accapare pour lui seul ce qui est à chacun. Et toi, n’es-tu pas avare, n’es-tu pas spoliateur, quand tu t’appropries les biens que tu as reçus en intendance ? Celui qui dépouille un homme de ses vêtements est appelé voleur, mais celui qui ne couvre pas l’homme qui est nu, alors qu’il peut le faire, mérite-t-il un autre nom ? Il appartient à celui qui a faim, le pain que tu gardes ; à celui qui est nu, le manteau que tu conserves dans tes coffres ; à celui qui est sans chaussures, la chaussure qui pourrit chez toi ; au pauvre, l’argent que tu tiens enfoui. Ainsi, tu commets autant d’injustices qu’il y a de personnes à qui tu pourrais donner.

– Saint Basile le Grand, Homélie 6, Sur cette parole de l’évangile de Luc : « Je détruirai mes greniers et j’en construirai de plus grands » (Lc 12, 18) et sur l’avarice.

***

Remarquez les mots : ton âme te sera redemandée. Comme des collecteurs d’impôt farouches, les anges effrayants viendront chercher ton âme, et tu ne voudras pas la donner parce que tu aimes cette vie et réclames les choses de cette vie comme les tiennes propres. Mais ils ne demandent pas l’âme du juste, parce que lui, il la confie de lui-même aux Mains de Dieu et Père des esprits, et il le fait avec joie et contentement, sans le moindre regret de remettre son âme à Lui. Pour lui, le corps est un fardeau léger, facile à ôter. Mais le pécheur a rendu son âme charnelle, semblable au corps et à la terre, la rendant difficile à séparer du corps. C’est pourquoi il faut lui demander son âme, de la même façon que de sévères collecteurs d’impôt traitent les débiteurs qui refusent de payer leur dû. Voyez que le Seigneur ne dit pas : « Je te redemanderai ton âme », mais elle te sera redemandée. Car les âmes des justes sont déjà dans les Mains de Dieu. En vérité, c’est dans la nuit que l’âme d’un tel pécheur est redemandée. Pour ce pécheur, c’est la nuit, car il est obscurci par l’amour de la richesse, la lumière de la connaissance divine ne peut pénétrer en lui, et la mort le surprend.

Ainsi celui qui amasse du trésor pour lui-même est appelé insensé : il ne cesse jamais de faire des projets et meurt au milieu d’eux. Mais s’il avait amassé du trésor pour les pauvres et pour Dieu, cela ne se serait pas passé ainsi. Efforçons-nous donc d’être riches pour Dieu, c’est-à-dire d’avoir foi en Lui, de L’avoir comme notre richesse et notre Dispensateur de richesse, et ne parlons pas de nos biens, mais des « Biens de Dieu ». S’ils sont à Dieu, ne privons pas Dieu de ses propres biens. C’est ce que veut dire être riche pour Dieu : c’est avoir confiance que même si je me vide et donne tout ce que j’ai, le nécessaire ne me manquera pas. Dieu est mon dispensateur des biens, j’ouvre ce trésor et j’en prends ce dont j’ai besoin.

– Saint Théophylacte de Bulgarie (1050-1126), Commentaire sur l’Évangile de Luc.

Saints célébrés ce dimanche selon le nouveau calendrier

Après-fête de la Présentation au Temple de la Très-Sainte Mère de Dieu et toujours vierge Marie (jusqu’au 25 Novembre). Saints Philémon, Onésime et Archippe, apôtres, avec sainte Apphia, épouse de saint Philémon, égale aux apôtres, martyrs à Colosses (70) ; sainte Cécile, avec saints Valérien, Tiburce et Maxime, martyrs à Rome (vers 230) ; saint Procope, lecteur, martyr en Palestine (303) ; saint Ménigne, martyr dans l’Hellespont (250) ; saint Agabus l’ismaélite, moine en Syrie (V°) ; saint Michel, prince de Tver (1318) ; saint Pierre, prince de Vladimir (1086) ; saint Pragmace, évêque d’Autun (VI°) ; saint Sabinien, abbé du Menât (vers 720) ; saint Daniel le jeune, abbé de Bangor en Irlande (621).

Synaxaire du hiéromoine Macaire

Saint Philémon, originaire d’une riche et noble famille de Colosses en Phrygie, devint chrétien, avec son épouse Apphia et leur fils Archippe, après avoir entendu la prédication de l’Apôtre Paul. Animé d’une grande foi et d’une ardente charité pour soutenir et aider tous ses frères en Christ, Philémon réunissait la communauté dans sa maison pour la célébration des saints Mystères et pour la prière, car on ne connaissait pas encore l’usage des églises.

Saints Philémon, Onésime et Archippe, apôtreJugé digne de la confiance de l’Apôtre, qui lui adressa une Lettre, restée dans le canon de la sainte Écriture, il fut consacré par lui évêque de Gaza en Palestine et chassa de cette ville les ténèbres de l’ignorance par la lumière de sa prédication. De retour à Colosses, il continua son œuvre missionnaire, malgré l’opposition acharnée des païens. Un jour, tandis que ces derniers célébraient les fêtes d’Artémis, les saints apôtres offraient dans leur maison le culte spirituel au seul Roi et Maître de l’univers. Les païens l’apprirent et, furieux, ils les arrêtèrent et les traînèrent devant le gouverneur Andronècle. Ayant refusé de sacrifier aux idoles, Archippe, le premier, fut flagellé, percé d’aiguilles par des enfants cruels, et finalement il mourut lapidé. Saint Philémon et Apphia furent à leur tour soumis à toutes sortes de tortures, à l’issue desquelles ils reçurent la couronne du martyre. Saint Onésime, leur esclave, survécut et ce n’est que plus tard qu’il accomplit à son tour l’ultime combat des athlètes du Christ.

Saints célébrés ce dimanche selon l’ancien calendrier

Saints Onésiphore et Porphyre, martyrs (vers 310) ; sainte Matrone, moniale à Constantinople (vers 492) ; saint Nectaire d’Egine, évêque de la Pentapole, thaumaturge (1920) ; saint Antoine, martyr en Syrie ; saints Claude, Castor, Symphorien et Nicostrate, martyrs en Pannonie (IV°) ; sainte Théoctiste, ermite dans l’île de Mitylène (881) ; saint Alexandre, martyr à Thessalonique (IV°) ; sainte Eustolie (610) et sainte Sopatra (vers 625), moniales à Constantinople ; saint Ursin, premier évêque de Bourges (vers 300) ; saint Vanne, évêque de Verdun (vers 525) ; saint Onésiphore des Grottes de Kiev (1148).

Synaxaire du hiéromoine Macaire

Évêque Nectarios EgnskyNotre saint Père Nectaire d’Egine naquit le ler octobre 1846, à Sélybrie , d’un couple de pauvres mais pieux chrétiens : Dèmos et Marie Képhalas. Nommé Anastase au saint baptême, il montra dès son enfance une grande piété et un goût profond pour l’étude. Comme sa mère lui apprenait le Psaume 50, il aimait à répéter le verset : J’enseignerai tes voies aux pécheurs… (Ps 50, 15). Après avoir reçu l’enseignement élémentaire dans sa patrie, il fut envoyé par ses parents à Constantinople afin d’y compléter son éducation, tout en travaillant comme employé dans un magasin. Le jeune garçon restait insensible aux troubles de la vie mondaine et se préoccupait seulement d’édifier en lui, nuit et jour, l’homme intérieur à l’image du Christ, par la prière et la méditation des écrits des saints Pères. À l’âge de vingt ans, il quitta Constantinople pour devenir instituteur dans l’île de Chio. Il y encourageait avec zèle la jeunesse et les villageois à la piété et aux œuvres de la vertu, non seulement par ses paroles, mais surtout par l’exemple même de sa vie d’ascèse et de prière. Désirant depuis longtemps embrasser la vie semblable aux anges, il devint moine sous le nom de Lazare, le 7 novembre 1876, dans le célèbre monastère de Néa-Moni. Ne recherchant que les choses d’en haut, modèle de douceur et d’obéissance, il se fit aimer de tous les frères, et fut ordonné diacre un an après sa profession monastique. Grâce à la générosité d’un pieux habitant de l’île, puis à la protection du patriarche d’Alexandrie, Sophrone, il put parachever ses études à Athènes et obtenir le diplôme de la faculté de Théologie.

En 1885, il gagna Alexandrie, où il fut bientôt ordonné prêtre, puis consacré évêque de la Pentapole (ancien diocèse correspondant à la Libye supérieure). Prédicateur et secrétaire patriarcal, il fut affecté à l’église Saint-Nicolas au Caire, en tant que représentant du patriarche. Malgré ces honneurs, Nectaire ne perdait rien de son humilité et il savait communiquer à son troupeau spirituel le zèle pour les vertus évangéliques. L’amour et l’admiration que nourrissait le peuple à son égard tournèrent pourtant à son désavantage. À l’instigation du diable, certains membres du patriarcat, jaloux de ses succès, le calomnièrent, en disant qu’il cherchait à s’attirer les faveurs du peuple dans le but de s’emparer du trône patriarcal d’Alexandrie. Comme le saint ne cherchait pas à se justifier et mettait sa confiance dans la promesse du Christ qui a dit : Bienheureux serez-vous quand on vous insultera, qu’on vous persécutera et qu’on vous calomniera de toute manière à cause de moi… (Mt 5, 11), il fut chassé. Il s’embarqua alors pour Athènes, où il se retrouva seul, ignoré, méprisé, et manquant même du pain quotidien, car il ne savait rien garder pour lui-même et distribuait aux pauvres ses maigres ressources. Abandonnant son projet initial de se retirer au Mont Athos, le doux et humble imitateur de notre Seigneur Jésus-Christ, préféra sacrifier son amour de la retraite au salut de son prochain. Il assuma la charge de prédicateur pendant quelques années (1891-1894), puis fut nommé directeur de l’École Ecclésiastique Rizarios, établissement destiné à la formation des futurs prêtres. Sa profonde connaissance de l’Écriture, des saints Pères et même des sciences profanes, ainsi que son autorité pleine de douceur dans la direction des hommes, lui permirent de donner rapidement à cette institution une haute qualité intellectuelle et morale. Le saint hiérarque se chargeait de la direction et des leçons de Pastorale, mais il n’en cessait pas pour autant de suivre le programme d’ascèse, de méditation et de prière d’un moine, en y ajoutant les fonctions de prédication et la célébration régulière des saints Mystères, au sein de l’école et dans la région d’Athènes.

Le serviteur de Dieu gardait pourtant au fond de son cœur un amour brûlant pour la quiétude et la paix qu’offre la vie dans un monastère, aussi profita-t-il du désir exprimé par un certain nombre de ses filles spirituelles pour se retirer des troubles de la vie mondaine et fonder un monastère féminin dans l’île d’Égine (entre 1904 et 1907), où il s’installa en 1908, après avoir démissionné de la direction de l’école ecclésiastique. Malgré d’innombrables soucis et de multiples difficultés, le saint veillait à y instaurer un type de vie cénobitique dans la fidélité scrupuleuse à l’esprit des saints Pères. Il dépensait sans compter ses forces physiques et spirituelles pour l’installation des bâtiments, pour la célébration des offices et pour la direction spirituelle de chacune de ses disciples. On le voyait souvent travailler au jardin, vêtu d’une misérable soutane, ou même réparer les chaussures des moniales. Et lorsqu’il disparaissait pour de longues heures, on devinait qu’il s’était enfermé dans sa cellule pour élever son intelligence vers Dieu. Bien qu’il eût fui tout contact avec le monde et qu’il réglât strictement les visites dans le couvent, la réputation de ses vertus et des grâces que Dieu lui avait accordées se répandit dans la région, et les fidèles venaient vers lui, attirés comme le métal par l’aimant. Il guérit de nombreux laïcs et des moniales des maux qui les affligeaient, et fit venir la pluie sur l’île qui souffrait de la sécheresse. Il soulageait, consolait, encourageait, se faisait tout pour tous, pouvant tout dans le Christ qui habitait en lui par la grâce du Saint-Esprit. Il était familier des saints et de la Mère de Dieu, et ceux-ci lui apparaissaient fréquemment pendant la Divine Liturgie ou dans sa cellule. Malgré les difficultés de la période qui suivit la Première Guerre mondiale, il interdisait strictement à ses moniales de mettre quoique ce fût en réserve pour leur nourriture, et leur ordonna même de distribuer leurs surplus aux pauvres, en se confiant au jour le jour à la miséricorde de Dieu. En plus de toutes ces tâches, saint Nectaire trouvait le temps de rédiger un grand nombre d’ouvrages de théologie, de morale, d’histoire de l’Église pour la confirmation de l’Église dans la tradition des saints Pères, alors souvent ignorée en Grèce du fait des influences occidentales. Vivant comme un ange dans un corps et faisant briller autour de lui les rayons de la lumière incréée de la grâce, le bienheureux eut encore à souffrir calomnies et injustes accusations sur son monastère, de la part de certains membres de la hiérarchie. Il supporta ces dernières épreuves avec la patience du Christ, sans murmure ni révolte.

C’est alors qu’il fut atteint d’une douloureuse maladie pendant plus d’un an et demi. Il rendait grâce à Dieu de l’éprouver ainsi et s’efforça de garder son mal secret jusqu’aux tout derniers temps qui précédèrent sa mort. Après un dernier pèlerinage auprès d’une icône de la Mère de Dieu, située non loin du monastère, il annonça à ses disciples son prochain départ pour le Ciel. Quelques jours passèrent et il dut être transféré dans un hôpital d’Athènes, où, après cinquante jours de souffrances qu’il supporta avec une patience qui édifiait tous ceux qui l’approchaient, il remit en paix son âme à Dieu, le 8 novembre 1920. Les fidèles d’Égine, ses disciples et tous les chrétiens qui l’avaient approchés pleurèrent la perte du doux et compatissant disciple du Christ, qui, toute sa vie, avait supporté calomnies, persécutions et injustes accusations en prenant pour modèle la divine Passion de son Maître. Mais Dieu lui a rendu gloire et, dès son repos, les miracles ont abondé et abondent quotidiennement jusqu’à ce jour pour ceux qui approchent avec foi de ses reliques ou qui se confient à sa puissante intercession.

Le corps de saint Nectaire resta miraculeusement exempt de corruption pendant plus de vingt ans, dégageant un parfum céleste et délicat. En 1953, lorsqu’il fut finalement décomposé selon les lois de la nature, on procéda à la translation de ses reliques et l’on put alors constater que le même parfum s’en dégageait puissamment. Il n’a pas cessé depuis de réjouir les fidèles qui s’approchent de ces précieux restes, en leur donnant l’assurance qu’il a trouvé accès auprès de Dieu dans la demeure des saints. Son culte a été officiellement reconnu en 1961 et le récit de ses miracles ne cesse d’être écrit chaque jour. Son tombeau, à Égine, est devenu un des pèlerinages les plus fréquentés de Grèce.