Lectures du jour : Act 6,1-7 ; Mc 15,43-16,8.
Le jour de Pâques inaugure une ère nouvelle et nous introduit dans l’éternité de Dieu, à laquelle nous participons liturgiquement par une période de 8 jours qui sont considérés comme un seul, comme une semaine de 8 dimanches. Ainsi, du jour même de Pâques au samedi suivant, presque les mêmes hymnes pascales sont reprises, avec une répétition insistante du tropaire pascal, bref mais très dense. Au-delà d’une conviction intellectuelle, cette répétition nous enracine dans la foi. Le dimanche suivant Pâques, 8e jour, propose d’autres hymnes pour commémorer spécialement l’apparition du Ressuscité en présence de l’apôtre Thomas, d’abord incrédule, mais qui confesse le Ressuscité. Cet épisode est évoqué toute la semaine qui suit.
La fête d’aujourd’hui, 3e dimanche de Pâques si l’on compte le jour même de la Fête des fêtes, l’Église nous propose un retour liturgique vers les événements de la mise au Tombeau, puis de la Résurrection du Sauveur.
Les premières à avoir vu le Tombeau vide sont quelques femmes, à qui un jeune homme vêtu de blanc (selon Mc 16,5) annonce la Résurrection ; il leur demande de transmettre la Bonne Nouvelle aux disciples. C’est le tout début du témoignage de la Résurrection, que depuis lors l’Église ne cesse de réactualiser, avec l’assistance constante de l’Esprit Saint.
Les premiers témoins de la Résurrection sont donc les femmes, venues car elles pensaient terminer les soins funéraires avec des parfums. La liturgie du jour leur associe aussi la mémoire de Joseph d’Arimathie et de Nicodème, des disciples cachés du Christ qui avaient aidé à la descente de la Croix et à la mise au Tombeau (v. par exemple Mc 15,43 ; Mt 19,28 et Jn 19,38). Dans les Évangiles, les rôles des femmes et de ces deux disciples sont relativement discrets, là où il est plus question des Douze Apôtres et disciples du Christ. Ici, ce sont ces personnes précédemment discrètes qui assument désormais une fonction de premier plan, en apprenant et transmettant la Bonne Nouvelle.
Cette première découverte de la Résurrection est accompagnée, de la part du ou des anges, selon les divers récits des quatre Évangiles, d’une demande de transmission aux Apôtres, et ceux-ci seront les fondateurs de l’Église. Ainsi la Bonne Nouvelle de la Résurrection parvient jusqu’à nous, par l’Église, avec l’assistance de l’Esprit Saint à chaque génération et à chaque instant. Cette annonce de la Bonne nouvelle est adaptée à chaque destinataire, différemment aux femmes et aux Onze.
Le collège des Apôtres a pour mission et vocation de fonder l’Église et sa hiérarchie. Après la Pentecôte, les Apôtres nommeront des évêques (littéralement : « surveillants ») et des anciens (appelés presbytres) qui deviendront les prêtres ; selon la lecture de l’Épître du jour (Act 6,1-7), l’institution des Sept serviteurs (diakonoi) est traditionnellement identifiée avec le rôle des diacres.
L’action concrète de l’Esprit Saint est soulignée dans le livre des Actes des Apôtres, et depuis lors, chaque membre de l’Église, homme ou femme, membre de la hiérarchie constituée ou personne laïque, a son rôle à jouer comme témoin de la Résurrection ; chaque personne chrétienne, même la plus discrète, la vit et l’annonce, non nécessairement par un discours ou une action extérieure, mais en tout cas, simplement, par sa propre vie. Le témoignage de la Résurrection peut même être un silence.
Les femmes porteuses de parfum, et aussi les disciples cachés du Sauveur, montrent la discrétion initiale avec laquelle s’est propagée la Bonne Nouvelle de la Résurrection. Le récit évangélique montre que les femmes sont d’abord pleines d’effroi, n’osant rien dire de cette Bonne Nouvelle. La Résurrection est un événement inouï, dépassant les limites de notre esprit humain, et indémontrable. Mais leur rôle essentiel sur le moment, et aussi maintenant leur intercession, ainsi que notre vénération pour les disciples cachés, hommes et femmes, tout cela continue à nous assister aujourd’hui dans notre confession de foi du Christ ressuscité. L’Église n’a pas pour vocation première d’être visible ni célèbre aux yeux du monde, mais de constituer un véritable ferment (v. Mt, 13,33) à l’œuvre au cœur d’un environnement parfois hostile, mais au sein duquel, contre toute apparence, grandit le Royaume des Cieux. Il ne nous appartient pas, comme chrétiens, de savoir de quelle manière ce Royaume se manifeste, mais avant tout de conserver et développer en nous la foi ou la certitude en sa venue, d’abord dans nos cœurs, où avec la prière des Saints il grandit, pour se manifester à la fin des temps que nous attendons avec ferveur. Notre vocation est d’entrer dans le Royaume, chaque jour un peu plus, en apprenant à remercier et glorifier sans fin le Christ ressuscité.
Note catéchétique : à propos de la lecture liturgique des Actes des Apôtres entre Pâques et Pentecôte
Le choix de ce livre biblique comme lecture durant la période de fête entre Pâques et Pentecôte est expliqué par S. Jean Chrysostome (4e s.), dans le début de ses Homélies sur les Actes. Le célèbre prédicateur interprète ce livre du Nouveau Testament comme un témoignage de la Résurrection. C’est en effet grâce à la puissance du Christ ressuscité que les Apôtres ont pu prêcher et accomplir des signes et des prodiges décrits dans les passages choisis et lus en ce moment ; ils ont pu aussi triompher de toutes sortes de périls et d’épreuves.
Lorsque nous lisons les Actes des Apôtres, que cette puissance de la Résurrection nous assiste aussi à chaque instant et nous aide à triompher de tout qui en nous et autour de nous s’oppose à notre foi en la Résurrection et en la venue du Royaume de Dieu dans nos cœurs.