Message pour le 2e Dimanche de Carême, 28/3/2021

Rappel: pas de célébration organisée samedi prochain 27 mars, et pas de Liturgie dimanche 28 mars, merci de votre compréhension.

Message pour le 2e Dimanche de Carême, 28/3/2021
En ce deuxième dimanche de Carême, la liturgie de l’Église nous propose le récit d’une guérison par notre Sauveur d’un paralyique descendu dans une maison depuis la toiture par des porteurs, dont le récit souligne la foi (Mc 2,5). Le Christ commence par déclarer à ce paralytique que ses péchés lui sont remis : c’est un acte inouï, car seul Dieu peut accomplir cela, et parmi les témoins de l’événement, beaucoup pensaient encore que Jésus est un simple homme parmi d’autres ; ils ignoraient le pouvoir illimité de sa divinité. D’après des commentaires évangéliques de S. Jean Chrysostome (Homélies sur Mt, n° 19 et 29), puisque le péché est une offense à Dieu, seul Celui qui a été offensé peut annuler ou remettre l’offense. C’est dire aussi l’importance du commandement du Christ, déjà entendu voici quelques semaines, nous demandant de pardonner à autrui si nous voulons que Dieu nous pardonne (Mt 6,14-15, lecture du Dimanche de l’expulsion d’Adam).

Ici et ailleurs, le Christ S’appelle Lui-même Fils de l’homme et déclare pouvoir pardonner les péchés. Cette rémission est une guérison de l’âme, aussitôt suivie de celle du corps, plus visible et spectaculaire. À travers la guérison du corps, le Sauveur affirme devant les témoins de l’événement sa toute puissance. La fonction de remettre les péchés a depuis été partagée par le Sauveur Lui-même, une fois ressuscité, d’abord aux onze Apôtres : « Ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis » (Jn 20,21). Et la tradition des Pères nous enseigne que cette fonction de rémission a été transmise ensuite des Apôtres aux évêques, leurs successeurs (v. par exemple S. Ambroise de Milan, dans son Traité sur la pénitence). Lorsque dans l’Église le prêtre, à qui l’évêque a délégué une partie de ses fonctions, déclare les péchés pardonnés, il ne le fait pas en son nom propre, mais implore : « Que Dieu te pardonne » (dans le rituel de la confession, Euchologe). Cette fonction de rémission des péchés est ainsi exercée aujourd’hui par les prêtres, chacun avec la bénédiction de son évêque, lequel lui-même l’a reçue des Apôtres. Autrefois, jusqu’au 4e siècle, époque de S. Jean Chrysostome et de S. Ambroise, cette fonction était exercée par les seuls évêques. Quoi qu’il en soit, un tel partage des fonctions ne se fait jamais d’une manière coupée de Dieu, et un évêque ou un prêtre n’agit jamais isolément, mais dans l’Église.

Ce partage de fonction apostolique est un cas particulier de la vocation de tout être humain, d’être selon le mot de l’Apôtre Saint Pierre « participant de la nature divine » (II P 1,4). Cette expression a été beaucoup commentée par plusieurs Pères de l’Église, qui ont élaboré à partir de là une doctrine appelée déification, résumée en une affirmation devenue célèbre : « Dieu S’est fait homme pour que l’homme devienne dieu » (S. Irénée de Lyon, 2e s. ; S. Athanase le Grand, 3e s. ; S. Grégoire le Théologien, 4e s., et d’autres). Cette déification de l’homme n’a rien d’automatique, mais elle est voulue par Dieu, notre Créateur, qui veut nous faire partager ce qu’Il a de meilleur, sa nature divine. L’être humain ne deviendra jamais dieu par nature, il reste une personne humaine, mais sa vocation, voulue par Dieu, est qu’il devienne dieu par participation.

C’est ce qu’a exprimé aussi Saint Grégoire Palamas, évêque de Thessalonique au 14e s., et dont nous fêtons la mémoire en ce deuxième dimanche du Carême. Les moines de son entourage, que l’on a appelé des hésychastes, ont réellement fait et font encore l’expérience, grâce à leur prière soutenue par le jeûne, de cette déification authentique, jusque dans leur corps, car ils ont réellement contemplé la Lumière de Dieu incréée. Cette Lumière a été identifiée par S. Grégoire avec celle vue par les trois Apôtres lors de la Transfiguration du Sauveur (Mt 17,2 et parallèles), d’un éclat insoutenable. S. Grégoire Palamas et les autres moines hésychastes ont dû lutter pour défendre l’authenticité de cette expérience, car des adversaires influencés par un esprit trop rationnel ont prétendu que leur vision était le fruit d’une illusion. Mais la participation à Dieu, ou déification, d’après la tradition ancienne de l’Église, a été déclarée authentique par deux conciles tenus au 14e s. à Constantinople, qui ont canonisé S. Grégoire Palamas. D’autres Pères plus anciens avaient déjà affirmé que Dieu est inconnaissable et invisible en sa nature divine, mais participable en ses énergies incréées. Elles sont comme des émanations de la divinité, comme la Lumière incréée ; ces énergies pénètrent la création, et l’être humain, en le transformant de l’intérieur pour le rapprocher de Dieu.

C’est cette synthèse doctrinale opérée au 14e s. qui, après le Triomphe de l’Orthodoxie célébré dimanche dernier, nous vaut cette mémoire spéciale de S. Grégoire Palamas en ce deuxième dimanche de Carême. Le mouvement appelé hésychaste vient d’un mot grec dont le sens s’apparente à une tranquillité ou à un silence intérieur, mais il s’agit plus profondément d’une recherche de communion avec Dieu, en faisant d’abord attention à éviter de se laisser distraire par toute action, parole ou pensée qui empêche la prière ; pour cela est nécessaire un certain silence intérieur. À cette recherche profonde le corps participe aussi, donné à nous comme instrument en vue de notre salut et non pour le péché, d’où l’importance de soutenir notre prière par le jeûne, également corporel. On voit dans le récit de guérison du paralytique que la rémission de ses péchés est accompagnée de son relèvement physique, car le corps est étroitement lié à l’âme, promis également à la transfiguration et à la déification. L’Apôtre Paul parle de notre corps qui deviendra spirituel lors de la Résurrection finale (I Cor 15, 42-44). Cette restauration du paralytique, en son âme et en son corps, témoigne de la vocation promise par Dieu à tout être humain, spécialement en ce jour avec les prières de S. Grégoire Palamas, d’être uni à Dieu pour participer à sa nature et Le glorifier sans fin, Père et Fils et Saint Esprit, maintenant et toujours et pour les siècles.

Lectures du jour : Hb 1,10-2,3 et Mc 2,1-12, et mémoire de S. Grégoire Palamas : Hb 7,26-8,2 et Jn 10,9-16.

Lectures : http://toulouse-orthodoxe.com/dimanche-28-mars-2e-dimanche-de-careme-de-saint-gregoire-palamas/