Dimanche 1 décembre 2019

Dimanche 1 décembre 2019.

(18 novembre dans l’ancien calendrier.)

 

Péricopes de ce dimanche

Lecture de l’épître de saint Paul aux Éphésiens (2, 14-22) :

Frères, c’est le Christ qui est notre paix : des deux, le Juif et le païen, il a fait une seule réalité ; par sa chair crucifiée, il a détruit ce qui les séparait, le mur de la haine ; il a supprimé les prescriptions juridiques de la loi de Moïse. Ainsi, à partir des deux, le Juif et le païen, il a voulu créer en lui un seul Homme nouveau en faisant la paix, et réconcilier avec Dieu les uns et les autres en un seul corps par le moyen de la croix ; en sa personne, il a tué la haine. Il est venu annoncer la bonne nouvelle de la paix, la paix pour vous qui étiez loin, la paix pour ceux qui étaient proches. Par lui, en effet, les uns et les autres, nous avons, dans un seul Esprit, accès auprès du Père. Ainsi donc, vous n’êtes plus des étrangers ni des gens de passage, vous êtes concitoyens des saints, vous êtes membres de la famille de Dieu, car vous avez été intégrés dans la construction qui a pour fondations les Apôtres et les prophètes ; et la pierre angulaire, c’est le Christ Jésus lui-même. En lui, toute la construction s’élève harmonieusement pour devenir un temple saint dans le Seigneur. En lui, vous êtes, vous aussi, les éléments d’une même construction pour devenir une demeure de Dieu par l’Esprit Saint.

Ибо Он есть мир наш, соделавший из обоих одно и разрушивший стоявшую посреди преграду, упразднив вражду Плотию Своею, а закон заповедей учением, дабы из двух создать в Себе Самом одного нового человека, устрояя мир, и в одном теле примирить обоих с Богом посредством креста, убив вражду на нем. И, придя, благовествовал мир вам, дальним и близким, потому что через Него и те и другие имеем доступ к Отцу, в одном Духе. Итак вы уже не чужие и не пришельцы, но сограждане святым и свои Богу, быв утверждены на основании Апостолов и пророков, имея Самого Иисуса Христа краеугольным камнем, на котором все здание, слагаясь стройно, возрастает в святый храм в Господе, на котором и вы устрояетесь в жилище Божие Духом.

Lecture de l’Évangile selon saint Luc (18, 35-43) :

En ce temps-là, comme Jésus était près de Jéricho, un aveugle était assis au bord du chemin et mendiait. Il entendit la foule passer et demanda ce qui arrivait. On lui dit : « c’est Jésus de Nazareth qui passe. » Alors il cria : « Fils de David, aie pitié ! » Ceux qui marchaient en tête le reprenaient pour le faire taire ; mais il criait encore plus fort : « Fils de David, aie pitié ! » Jésus s’arrêta et ordonna qu’on le lui amenât. Quand il fut près de lui, Jésus lui demanda : « Que veux-tu que Je fasse pour toi ? » L’autre répondit : « Seigneur, que je retrouve la vue ! » Jésus lui dit : « Retrouve la vue : ta foi t’a sauvé. » L’aveugle retrouva aussitôt la vue ; il suivit Jésus en célébrant la gloire de Dieu. Voyant tout cela, tout le peuple se mit à adresser des louanges à Dieu.

Когда же подходил Он к Иерихону, один слепой сидел у дороги, прося милостыни, и, услышав, что мимо него проходит народ, спросил: что это такое? Ему сказали, что Иисус Назорей идет. Тогда он закричал: Иисус, Сын Давидов! помилуй меня. Шедшие впереди заставляли его молчать; но он еще громче кричал: Сын Давидов! помилуй меня. Иисус, остановившись, велел привести его к Себе: и, когда тот подошел к Нему, спросил его: чего ты хочешь от Меня? Он сказал: Господи! чтобы мне прозреть. Иисус сказал ему: прозри! вера твоя спасла тебя. И он тотчас прозрел и пошел за Ним, славя Бога; и весь народ, видя это, воздал хвалу Богу.

Paroles des Pères

L’aveugle, c’est le genre humain : exclu des joies du paradis en la personne de son premier père, privé des clartés de la lumière d’en haut, il subit les ténèbres de sa condamnation. Mais retrouvant la lumière grâce à la présence de son Rédempteur, il en vient à apercevoir, en les désirant, les joies de la lumière intérieure. Et il pose le pas de ses bonnes œuvres sur le chemin de la vie. […]

Voyez : celui que la foule réprimande pour le faire taire, il crie de plus belle. De la même manière, plus l’orage des pensées charnelles nous tourmente, plus nous devons intensifier notre effort de prière. La foule veut nous empêcher de crier, puisque nous subissons souvent jusque dans la prière le harcèlement des images de nos péchés. Mais il faut que la voix de notre cœur persiste avec d’autant plus de force que la résistance qu’elle rencontre est plus dure, afin de maîtriser l’orage de nos pensées coupables, et de toucher, par l’excès même de son importunité, les oreilles miséricordieuses du Seigneur.

Chacun, je le suppose, a expérimenté en lui-même ce que je vais vous dire : lorsque nous détournons notre esprit de ce monde pour le tourner vers Dieu, et que nous nous appliquons à la prière, voilà que nous devons supporter dans notre prière, comme une chose importune et pénible, cela même que nous avions accompli avec délice. C’est à peine si la main d’un saint désir peut en chasser le souvenir des yeux de notre cœur, à peine si les gémissements de la pénitence peuvent triompher des images qui en résultent.

Mais si nous persévérons avec insistance dans notre prière, nous arrêtons en notre âme Jésus qui passe. Aussi est-il ajouté : « Jésus, s’arrêtant, demanda qu’on le lui amène. » Voici qu’Il s’arrête, Lui qui passait : en effet, tant que les foules des images nous oppressent dans la prière, nous avons comme l’impression que Jésus passe ; mais quand nous persévérons avec insistance dans notre prière, Jésus s’arrête pour nous rendre la lumière, puisque Dieu se fixe en notre cœur, et que la lumière perdue nous est rendue.

– Saint Grégoire le Grand (540-604), Homélie du 19 novembre 590, prononcée devant le Peuple dans la Basilique saint Pierre.

***

Le récit que nous fait l’Évangile de l’épisode de sa guérison nous met en présence d’un certain nombre de faits fondamentaux pour la compréhension de la prière. (…) Un Père de l’Église nous dit que la prière est semblable à une flèche. Elle est toujours capable de voler, de toucher le but, de percer des épaisseurs de résistance, mais elle ne vole que si un arc et une main vigoureuse la lancent vers le but. Elle n’en touche le centre que si l’œil de l’archer est perçant et attentif. Et ce qui manque à notre prière le plus souvent c’est cette vigueur de l’esprit, cette tension, ce sens de la situation désespérée, proprement tragique, où nous sommes et d’où nous devons sortir coûte que coûte, quel que soit le prix à payer. […]

L’aveugle crie et, plus on essaie de lui imposer le silence, plus il crie, désespérément. Et c’est parce qu’il prie et demande la seule chose qui est d’une importance absolue pour lui, qu’il est entendu, que le Seigneur l’appelle, que Dieu le guérit et ouvre devant lui une vie nouvelle.

Quelle leçon complexe pour nous ! Avec quel sérieux devons-nous aborder la prière si nous voulons qu’elle soit digne de la grandeur de notre destinée humaine et de Celui qui en toute humilité est prêt à nous entendre. Le désespoir, la faim de Dieu, la nécessité ultime de ce que nous demandons : voilà les conditions pour que cette flèche qu’est notre prière soit lancée par un arc tendu d’une main vigoureuse, dirigée par un œil sûr.

Il y a dans ce récit un trait particulier sur lequel je voudrais encore m’arrêter. C’est le tumulte dans lequel cette prière est apportée au Seigneur. Car cette rencontre de Bartimée (l’aveugle) s’est faite dans un double tumulte. Dans le tumulte intérieur des sentiments contradictoires qui luttaient en lui, l’espérance et le désespoir, la crainte, l’élan, et d’un tumulte extérieur : toutes ces voix qui lui commandaient de se taire parce que le Seigneur était occupé des choses plus dignes de Sa grandeur et de Sa Sainteté. Bartimée n’est pas le seul à rencontrer le Seigneur dans le tumulte. Notre vie tout entière est un tumulte incessant ; une succession de situations qui exigent que nous leur soyons présents, de sentiments, de pensées, de mouvements de cœur et de la volonté qui s’allient, et se défient, qui s’unissent et se disloquent ; et dans ce tumulte à la fois intérieur et extérieur, notre âme se tend vers le Seigneur, clame vers Lui, cherche à trouver en Lui son apaisement. Et si souvent nous croyons qu’il serait si facile de prier si rien ne nous en empêchait, et pourtant ce tumulte même pourrait servir d’appui à notre prière.

Mais comment prier dans le tumulte ? Je voudrais donner quelques exemples qui puissent nous faire saisir la possibilité fondamentale de cette démarche ; je dirais presque l’avantage fondamental de ce tumulte qui, comme des aspérités des rocs, nous permet l’ascension vers le sommet alors que nous sommes incapables de voler. Le premier récit que je voudrais vous faire est tiré des Vies des Pères de l’Église. Un ascète anonyme rencontre un soir dans les montagnes un autre ascète, un homme de prière. Une conversation s’engage entre eux et, au cours de cet entretien, le visiteur, frappé de l’état de prière où se trouve son compagnon lui dit : « Père, qui t’a enseigné la prière incessante ? » Et son hôte, qui a perçu en lui un homme d’expérience spirituelle, réplique : « Ce n’est pas à chacun que je ferais cette réponse, mais je te le dirai en vérité : ce sont les démons. » Et le visiteur lui dit : « Je crois te comprendre. Père, mais peut-être voudrais-tu m’expliquer avec plus de détails la façon dont ils t’ont instruit, pour que je ne risque pas de te mal comprendre ? » Et l’autre lui fait le récit suivant : « Quand j’étais jeune, dit-il, j’étais illettré et j’habitais un petit village de la plaine. Un jour, entré dans une église, j’entendis le diacre lire l’épître de saint Paul qui nous commande de prier sans cesse. Je fus pénétré de chaleur, de joie et de lumière à entendre ces paroles ; et, à la fin de l’office, transporté d’allégresse, je quittai le village et me retirai dans les montagnes pour ne vivre que de prière. Pendant quelques heures cet état persista en moi. Puis le soir commença à tomber, la nuit se fit plus froide, des bruits inquiétants commencèrent à se faire entendre autour de moi, des pas, des hurlements ; des yeux étincelants apparurent ; les bêtes fauves étaient sorties de leurs repaires pour chercher la nourriture que Dieu leur accordait. La peur s’empara de moi qui devint de plus en plus angoissante à mesure que les ombres se faisaient plus pesantes. Et toute la nuit passa dans l’effroi qu’éveillaient en moi les pas, les craquements, les ombres, les scintillements d’yeux, le sens de ma faiblesse et la conscience que je ne savais où chercher le secours. C’est alors que je commençai à crier vers Dieu les seules paroles qui me vinrent à l’esprit, des paroles nées du tragique de ma situation, de la terreur qui s’était emparée de moi : « Seigneur, Jésus-Christ, Fils de Dieu, aie pitié de moi pécheur ! »

Ainsi se passa la première nuit. Au matin mes terreurs se dissipèrent, mais la faim commença à me tenailler ; je cherchai ma nourriture dans les buissons et dans les guérets et je pus à peine assouvir ma faim. Et lorsque le soleil commença à baisser et que je sentis que les terreurs de la nuit allaient m’encercler de nouveau, je commençai à clamer vers Dieu ma peur et mon espérance.

Ainsi se passèrent des jours et des mois. Je m’habituai peu à peu aux terreurs que m’offraient la nature, mais à mesure que je luttais dans cette prière de tous les instants, des tentations et des épreuves nouvelles apparurent. Les démons, les passions commencèrent à m’assaillir de toute part et alors même que les bêtes de la nuit avaient cessé d’être pour moi un objet d’effroi, ce furent les puissances des ténèbres qui s’acharnèrent contre mon âme. Plus encore qu’auparavant je criai vers le Seigneur ces mêmes paroles jaillies de mon cœur dans ma première angoisse : « Seigneur, Jésus Christ, aie pitié de moi ! » Et cette lutte continua pendant des années.

Un jour, j’étais arrivé à l’ultime limite de mon endurance ; j’avais clamé vers Dieu sans cesse, du fond de mon désespoir et de mon agonie et aucune réponse ne venait. Il me sembla que Dieu était implacable et c’est alors à l’instant où une dernière fibre d’espérance se brisait dans mon âme, lorsque je m’abandonnai en disant au Seigneur : « Tu restes silencieux, Tu es indifférent à ce qui advient de moi et pourtant Tu es mon Dieu et mon Maître, et je mourrai là où je suis plutôt que d’abandonner ma quête ». Soudain, le Seigneur m’apparut et la paix descendit non seulement sur mon âme mais sur tout ce qui m’entourait. Le monde entier m’avait semblé enténébré et maintenant je le voyais baigné de la lumière divine, étincelant de la grâce qui repose sur toute chose de la Présence de Dieu qui soutient tout ce qu’Il a créé. Et alors dans un élan d’amour et de reconnaissance je criai vers Lui la seule prière qui exprimât tout ce qu’il y avait en moi : « Seigneur, Jésus Christ, Fils de Dieu, aie pitié de moi pécheur ! » Et depuis, que ce soit dans la joie, que ce soit dans l’angoisse, que ce soit dans la tentation et dans la lutte, que ce soit au moment où la paix descend, ces paroles jaillissent sans cesse de mon cœur. Elles sont un chant d’allégresse, elles sont un appel vers Dieu, elles sont mon cri de repentir. »

Cet exemple de l’ascète inconnu nous montre la façon naturelle dont l’angoisse véritable, le désespoir réel, le tumulte lorsque nous le refusons fait jaillir de nous cette prière, cet appel désespéré né d’une espérance plus forte que le désespoir même, nourri du désespoir et qui pourtant le transcende.

Souvent le tumulte nous entoure ; un tumulte combien moins tragique que celui qui entourait ce jeune ascète, mais nous nous abandonnons à lui, nous le laissons pénétrer en nous et c’est là notre défaite. C’est pour cela que notre prière est tremblante, hésitante, qu’elle est, elle-même, faite de tumulte, d’incertitude, d’incohérence. […] C’est là une erreur qui nous est souvent commune : au lieu de rechercher la sérénité qui est celle de Dieu nous demandons à Dieu d’entrer dans le tumulte qui est nôtre. Certes, Il y entre, mais avec Sa sérénité.

– Mgr Antoine Bloom, La prière.

Saints célébrés ce dimanche selon le nouveau calendrier

Saint Nahum, prophète (vers 600 av. J.-C.) ; saint Philarète le Miséricordieux de Paphlagonie (792) ; Sainte Florence, recluse à Comblé (367) ; saint Léonce, évêque de Fréjus (433) ; saint Ananias le Persan, martyr ; Saint Domnole, abbé de Saint-Laurent, évêque du Mans ( 581) ; saint Airy (ou Agéric, Aguy), évêque de Verdun (vers 590) ; saint Eloi, évêque de Noyon et de Tournai (660).

Extrait du Synaxaire du hiéromoine Macaire

Saint Nahum, prophète (vers 600 av. J.-C.)

Mémoire du saint Prophète Nahum. Le saint prophète Nahum était originaire d’Elqosh en Galilée et appartenait à la tribu de Syméon. Il vécut au VIIe siècle avant notre Seigneur et prophétisa l’anéantissement prochain de Ninive, la capitale du royaume d’Assyrie, par le roi des Mèdes (en 612 av. J.-C.), et la restauration du royaume de Juda. Septième des Petits Prophètes, son bref livre décrit avec grandeur le déchaînement de la colère du Seigneur contre les ennemis de son peuple : Il a pour chemin la tempête et l’ouragan, et la nuée est la poussière de ses pieds… Il fait trembler les montagnes et se fondre les collines ; la terre se soulève devant lui, ainsi que le monde et tous ses habitants. Mais le prophète proclame aussi la tendresse de Dieu pour ses élus : Le Seigneur est bon ; Il est un refuge au jour de la détresse et Il connaît ceux qui se confient en lui. De loin, il voit venir Celui qui doit apporter la paix définitive au peuple de Dieu : le Christ. Voici sur les montagnes, les pieds d’un messager de bonne nouvelle qui annonce la paix. Le nom du prophète était lui-même une prédiction de la miséricorde de Dieu, car il signifie « repos », « consolation ». Après avoir accompli sa mission, le saint prophète Nahum s’endormit en paix et fut enseveli dans la terre de ses pères.

Saints célébrés ce dimanche selon l’ancien calendrier

Saint Platon, martyr à Ancyre (vers 306) ; saints Romain, diacre, et Barul, enfant, martyrs à Antioche (303) ; saint Zachée, diacre, et Alphée, lecteur, martyrs à Gadara en Palestine (303) ; saint Patrocle, ermite en Berry (vers 576) ; saint Chaffre, abbé et martyr au diocèse du Puy en Auvergne (v. 630) ; sainte Aude, vierge à Paris (VIème s.) ; saint Romphaire, évêque de Coutances (VIème s.) ; saint Amand, abbé de Lérins (VIIème s.) ; saint Maudez, ermite en Cornouailles (VIème s.) ; saint Nicolas (Vinogradov), confesseur, prêtre (1948).

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